Petit rappel: une valeur de rendement est un titre d’une société qui distribue une grande part de ses bénéfices. Il s’agit de grandes sociétés arrivées à maturité. On peut citer par exemple Total, France Telecom ou Sanofi en France.
On les oppose généralement à des valeurs de croissance, dont le prix dépend surtout de l’espérance en un fort accroissement des bénéfices futurs. Ces sociétés ne distribuent généralement pas ou peu de dividendes.
Une stratégie d’investissement sur des valeurs de rendement ressemble généralement à ceci:
– on achète dans des creux de marchés (ou du moins ce qu’on espère être un creux !). Autrement dit, plus la valeur baisse et plus c’est l’occasion de se renforcer
– on attend et on récolte régulièrement les dividendes.
Les avantages de cette stratégie semblent évidents:
– peu de temps à consacrer à l’investissement (si ce n’est celui de BIEN choisir ses sociétés)
– même si le marché baisse à l’occasion, comme on améliore son prix de revient et que les dividendes tombent régulièrement, on est “sûr” de faire un bénéfice à long terme. Bénéfice encore décuplé si le marché monte…
MAIS, cela n’est pas rentable dans trois cas:
– si le marché baisse sur le long terme: les dividendes ne font que compenser la baisse de son porte-feuille.
– rien n’oblige une société à verser des dividendes. En cas de problème, elle peut être contrainte à diminuer voire à supprimer ces versements (et comme il s’agit d’une valeur de rendement, il est fort probable que sa valorisation boursière chute par la même occasion !) Sans parler d’une faillite éventuelle.
– si la devise de référence de l’action chute, les dividendes baissent mécaniquement. A moins de se couvrir contre les variations de devise bien sûr et/ou de diversifier un maximum à l’international, dans des zones économiques différentes, son porte-feuille. A noter que l’action peut très bien monter SI le marché estime que la société “vaut plus” que la devise concernée (la société devient en quelque sorte une valeur refuge comme l’or).
L’exemple du Japon:
On voit clairement que le Nikkei baisse depuis un bon bout de temps, certes avec des rebonds importants, mais l’ensemble est tout de même clairement baissier. Quelqu’un qui aurait acheté dans les creux (et ça, c’est plus simple à dire qu’à faire!), aurait acheté en 1999 vers 14000, en 2002 vers 8000, en 2008 vers 7500. A supposer qu’il aurait investi les mêmes sommes, il aurait un prix de revient moyen de 9833. Ce qui signifie, qu’actuellement, bien que nous soyons “dans un creux”(???), il serait en moins-value de près de 8% ! Ce qui, avec des dividendes réguliers et importants, aurait été certes compensé (en n’oubliant pas de soustraire l’effet de l’inflation…).
Mais, en réalité, je vous parie ce que vous voulez qu’il aurait un prix de revient moyen beaucoup plus proche des 12000-14000 points, ce qui ferait une moins-value de près de 25 à 35% réduisant dramatiquement ses gains faits avec les dividendes ajustés par l’inflation. Le tout pour un investissement d’une quinzaine d’années.
Vous allez me dire, oui mais nous on n’est pas au Japon. C’est exact.
Mais regardez ce graphique, qui fait le parallèle entre les indices US et ceux du Japon, avec un décalage de 11 ans certes…
Vous allez me dire, mais nous on n’est pas non plus aux USA. C’est exact, mais je vous épargne de vous faire la leçon sur l’influence immense du marché américain sur les indices européens…
Certes, je suis sûr qu’en cherchant bien, je peux trouver un graphique de l’évolution du prix des couches culottes, de la vodka et du CAC et en tirer des projections m’annonçant la fin du monde en 2012, mais mon propos ici est avant tout de dire que nous ne sommes pas à l’abri d’un long, très long marché baissier en Europe.
source:Â http://www.ritholtz.com/blog/2011/08/turning-japanese-spx-vs-nikkei-index-10-year-lag-2/
Avec des “larges caps”, on a du solide:
Les grandes sociétés, versant des dividendes régulièrement sont éternelles.
Oui, sauf quand elles s’écroulent…
Dans un marché incertain, peut-on vraiment dire qu’une société ne craint pas la faillite ? Bien sûr, il y aura toujours des McDo et du Coca…
Mais sans aller jusqu’Ã la faillite, on a aussi des valeurs comme France Telecom qui stagnent depuis 10 ans (certes en versant un confortable dividende).
Avec les petites sociétés de croissance, on peut pulvériser le rendement:
Il n’est pas rare d’avoir des sociétés qui font du +100 ou 200% en quelques années, voir en quelques mois si on a de la chance…
Soit la société va avoir un petit plus qui fera toute la différence (perspective brillante, découverte importante ou tout simplement rachat par une autre société à un bon prix) et on va avoir un gain très important.
Soit la société suit plus ou moins le marché, on aura donc un petit rendement, sans dividendes en général.
Soit la société s’écroule (d’où l’intérêt de mettre des stops et de se fixer un rapport gain/risque dès le départ).
Le fait d’acheter ce genre de sociétés dans les creux de marché donne des progression fulgurantes quand le marché se reprend. Prenons par exemple le cas de Sporever (une petite société travaillant dans les médias sportifs, sans rien de particulier en ce qui me concerne, que j’ai pris plus ou moins au hasard dans les small caps françaises):
Sa valorisation boursière passe d’environ 2,50 € par action à près de 15 ! Soit du +600% en un an.
L’autre intérêt pour moi de ce genre de société, c’est qu’on y est pas lié comme aux valeurs de rendement. Quand le marché dévisse, on n’hésite pas à revendre pour préserver ses bénéfices, alors qu’avec les valeurs de rendements, on va être tenter de subir la baisse dans l’attente d’acheter moins cher pour faire baisser le prix de revient (alors qu’en vérité, on est en train de perdre de l’argent).
Bref, ce sont deux visions différentes de l’investissement qui s’affrontent.
L’avantage du particulier est justement de pouvoir acheter des petites valeurs, ce qu’un gros hedge fund ne peut pas faire sans impacter profondément la société ciblée. Même Warren Buffet, investisseur à long terme orienté valeurs de rendement, a débuté avec des valeurs de croissance avant d’être contraint de par la taille de son fond d’investissement, de n’acheter plus que des parts dans des grosses sociétés.
En conclusion, si vous n’avez pas le temps de vous intéresser à la Bourse, une stratégie sur les valeurs de rendement peut être faite pour vous. Mais est-il prudent de jouer en Bourse sans en avoir réellement (au moins un minimum) le temps ?
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